Comme beaucoup d’autres héros de la bande dessinée belge, c’est pendant la triste période de la seconde guerre mondiale que les personnages de Bob et Bobette sont nés. Leur histoire commence, comme nous le savons, dans la presse néerlandaise. Les premières parutions se font uniquement sous cette forme et il ne s’agit donc pas encore de véritable bande dessinée. Mais Vandersteen n’a jamais perdu de vue son projet de faire publier ses histoires en albums. D’après lui, une création ne peut atteindre un très large public qu’en bénéficiant d’un support durable, ce qui n’est pas du tout le cas d’une bande découpée dans un journal.

C’est au moment où Willy se décide de travailler exclusivement pour le groupe Standaard que les choses vont fort heureusement changer. Il rencontrera un interlocuteur de choix en la personne de Wim Goderis. Celui-ci partage tout à fait ses idées. C’est ainsi que d’un commun accord, les aventures de Rikki et Bobette servent de banc d’essai. L’album se présente déjà avec une couverture rouge, cartonnée au centre de laquelle se retrouve l’illustration d’un dessin en quadrichromie. A l’intérieur, le cahier est imprimé en bleu sur un fond sépia relativement clair
(voir illustration 1).
Diffusé en 1946, ce premier album ne rencontrera pas un grand succès. Mais l’éditeur ne se décourage pas facilement. Ils vont donc renouveler l’expérience quelques mois après, mais cette fois, l’album, l’île d’Amphoria place un nouveau personnage, Robert Antigone, dit Bob. Vandersteen ne s’imagine pas encore qu’il va créer un couple mythique dans le monde du neuvième art. Bob et Bobette sont enfin réunis et sont appelés à vivre de nombreuses aventures. Les éditions Standaard en profitent pour changer un peu la maquette et donner un nouveau style tout à fait identifiable pour cette série prometteuse.

En 1947, pourvu de ce nouvel habillage, l’Album l’île d’Amphoria affronte les curieux et les acheteurs éventuels dans le rayon des librairies. Prudent cette fois, l’éditeur n’en fera tirer que quelques milliers d’exemplaires. Le démarrage est lent mais plein de promesses. En juin 1948, au prix unitaire de 36 francs belges (0,50 EUR) sortent coup sur coup, Le Rayon magique
(voir illustration 2) et La princesse enchantée (voir illustration 3).

Chronologiquement le titre La dame en noir aurait du constituer le quatrième tome. On lui attribuera le numéro 6. C’est également à partir de cette même année et jusqu’en 1959 que l’indicatif et légendaire « portrait de famille au pot de fleur » (voir illustration 4) figure sur le quatrième plat des albums. En 1951, les éditions Erasme, filiale francophone des Editions Standaard, publient les premiers albums en français.
Ceux-ci, tout comme en Flandre constitueront la célèbre collection rouge. Malheureusement, il ne sera jamais tenu compte de la vraie chronologie des premiers albums (voir la véritable chronologie). En Flandre, cette « Collection Rouge » atteint progressivement une incroyable popularité. L’éditeur suit attentivement l’évolution du marché. Wim Goderis ne lésinera jamais sur les moyens. Le succès de la série lui revient en grande partie.
Doué d’un remarquable sens des relations publiques, il adresse systématiquement des bons de commandes illustrés aux libraires. Il fait imprimer du papier à lettre à l’effigie des deux héros.

Il organise toute une campagne commerciale le jour de la distribution des résultats à l’école et à la saint Nicolas.
A l’occasion des fêtes de fin d’année, il organise une fastueuse séance de dédicaces au grand Bazar d’Anvers. Le mythe de Bob et Bobette est en train de naître. Tandis que sa renommée s’élargit, il doit faire appelle à des assistants. C’est son ami d’enfance, Bob De Moor qui accepte de le seconder provisoirement. Mais très rapidement, ce dernier devient à son tour un auteur dessinateur très demandé. C’est alors que Vandersteen fait appel à FJ Herman. Ce dernier devient le tout premier collaborateur graphique du maître.
Mais en 1952, François Joseph Herman tente lui, aussi de faire carrière dans le monde de la bédé. Mais en réalité sa première histoire intitulée Le Secret de la Mer est une copie conforme de Lambiorix, Roi des Eburons. Vandersteen réagira certainement car la bande dessinée de Herman est interrompue. En 1955, François Joseph remet ça. Excédé, Vandersteen décide de limiter la part de responsabilités de ses assistants. Il leur confiera uniquement les encrages. De 1949 à 1953, Vandersteen signe probablement ses meilleures réalisations. Sa collaboration au journal Tintin n’est certes pas étrangère à cette évidente amélioration. Tant graphiquement que narrativement, elle se manifestera aussi dans la collection rouge de la même période. Les dessins sont nettement plus soignés et le découpage de l’histoire mieux organisé. Les leçons d’Hergé auront donc porté leurs fruits et transformés cet incroyable dessinateur.

Malheureusement, celui-ci se fait la main sur l’encrage des dernières planches de l’Attrape mites et finit par maîtriser le coup de crayon de Vandersteen en travaillant sur l’album Lambique chercheur d’or puis dans Lambiorix, Roi des Eburons. Mais en 1952, François Joseph Herman tente lui, aussi de faire carrière dans le monde de la bédé. Lambiorix, Roi des Eburons.
(illustration 1)
(illustration 2)
(illustration 4)
(illustration 3)